26 février 2007

Un nouveau "droit opposable" : le droit au logement

Le droit « opposable » permet à tout citoyen de faire condamner par la justice toute autorité politique qui ne respecte pas la loi, et d'obtenir réparation quand un droit n'est pas respecté.

Le droit « opposable », pour se matérialiser, repose sur trois conditions :
1 - Désigner une autorité politique responsable.
2 - Doter cette autorité des moyens et prérogatives nécessaires.
3 - Ouvrir des voies de recours pour le citoyen.

Ainsi, en France, deux droits fondamentaux sont opposables : le droit à la scolarité et le droit à la protection de la santé. Il s'agirait maintenant d'en ajouter un troisième : le droit au logement.

Le droit au logement est affirmé dans la loi depuis longtemps (loi Quilliot 1982, loi Mermaz 1989, loi Besson 1990, loi de lutte contre les exclusions 1998), mais sans qu'il soit garantie effectivement.

Le "droit au logement opposable" viserait à permettre au mal-logé de se tourner vers les tribunaux s'il ne trouve pas de logement. Le tribunal pourrait astreindre l'autorité responsable de loger un plaignant, si celui-ci fait valoir de bonne foi qu'aucune offre ne lui a été proposée.

Un rapport du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées avait proposé en 2003, des voies pour mettre en place "l'opposabilité" en matière de logement. Garant du droit au logement, l'Etat devait selon le rapport déléguer son pouvoir aux "groupements intercommunaux". "En Ile-de-France, l'Etat délègue sa responsabilité à la région", ajoute-t-il. Pour avoir les moyens d'agir, l'Etat devrait mettre à disposition les moyens nécessaires. Le Haut Comité proposait ainsi de "doter les groupements intercommunaux d'un outil fiscal pour financer la mixité sociale". Il souhaitait aussi l'octroi de nouvelles prérogatives aux collectivités, qui pourraient intervenir dans l'attribution des logements sociaux, se verraient transférer le pouvoir de réquisition et disposeraient d'un "pouvoir de substitution pour maintenir dans les lieux jusqu'aux relogement les locataires dont le bail est résilié". Le rapport préconisait l'instauration dans chaque groupement intercommunal "d'une instance de médiation chargée d'examiner les recours amiables des requérants" et "la désignation d'une instance juridictionnelle", logiquement les tribunaux administratifs. Enfin, le rapport préconisait une obligation de résultat, afin d'éviter"de voir les protectionnismes locaux se renforcer au détriment des populations les plus fragiles".

A la suite de la Loi n° du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (dite loi ENL), le projet de loi sur le droit au logement opposable a été définitivement adopté le 21 février 2007. La loi du 21 février 2007 affirme l'opposabilité du droit au logement, en le plaçant désormais au même rang que le droit aux soins ou à l’éducation. Son article premier définit ainsi l'exercice de ce nouveau droit opposable :

"L’État garantit le droit au logement mentionné à l’article 1er de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 à toute personne qui, résidant sur le territoire français de façon régulière et stable, n’est pas en mesure d’accéder par ses propres moyens à un logement décent et indépendant ou de s’y maintenir. Cette garantie s’exerce par un recours amiable et par un recours contentieux selon les modalités fixées par la présente loi."

Objectif

Offrir un logement social aux personnes qui n’ont pas de ressources suffisantes pour accéder à un logement décent.

Qui est concerné ?

Les personnes "prioritaires" sont celles qui sont :
- menacées d’expulsion sans relogement ;
- hébergées temporairement ;
- logées dans un taudis ou une habitation insalubre ;
- privées de logement (les sans-abri);
- Les ménages avec enfants mineurs logés dans des conditions inacceptables liées à l’indécence du logement ou à sa sur-occupation;
- logés dans des locaux manifestement suroccupés ou ne présentant pas le caractère d'un logement décent» avec un enfant ou une personne à charge qui « présente un handicap ».

Comment faire valoir ce droit ?

L’Etat est désormais garant du respect du droit au logement. C’est donc contre l’Etat, après une procédure très encadrée, qu’un éventuel recours devant un tribunal administratif sera rendu possible.

Il sera possible, dans un premier temps, de saisir la commission de médiation. Créée par la loi d'orientation et de lutte contre les exclusions (nouvelle rédaction du CCH, art. L.441-2-3), la commission de médiation en matière de logement des personnes défavorisées est instituée dans chaque département. Cette commission émet déjà un avis et fait des propositions sur : toute réclamation relative à l'absence d'offre de logement de la part des organismes de logement social après un délai anormalement long. La loi Engagement National pour le Logement du 13 juillet 2006 a réformé l'organisation et le fonctionnement de la commission de médiation.

En cas d’avis favorable émis par cette commission et si celui-ci n’est pas suivi d’effet dans un délai raisonnable, un recours devant le tribunal administratif pourra être engagé. La commission de médiation devra « motiver » et transmette « par écrit » au demandeur sa décision sur le « caractère prioritaire ou non » d'une demande.

Le tribunal, qui devra statuer dans les deux mois, ordonnera alors le logement, le relogement ou encore l’accueil en structure adaptée. Une astreinte financière sera également exigée.

Calendrier

A compter du 31 décembre 2008, le droit opposable au logement sera ouvert aux personnes directement concernées.

A compter du 1er janvier 2012, ce droit sera étendu à toute personne éligible au logement social qui n’aurait pas reçu réponse à sa demande après un délai d’attente anormalement long.

Des dispositions sont-elles prévues avant le 31 décembre 2008 ?

Afin de permettre une application anticipée, une délégation aux collectivités territoriales volontaires - communes ou établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) - sera possible. Dans ce cadre, tout recours devant le tribunal administratif s’exercera non plus contre l’Etat mais contre ces collectivités.

Le droit opposable au logement est-il absolu ?

Ce nouveau droit n’est pas absolu et sans conditions.

Les attributions de logement seront effectuées dans le respect du droit commun. Un loyer sera demandé, même minime, afin de responsabiliser les bénéficiaires.

Le choix de la commune de résidence ne sera pas libre. Il sera exigé du demandeur de résider depuis un an sur le territoire de la commune ou de l’EPCI.

Critiques :

- S'il est vrai qu'à compter du 31 décembre 2008, le droit opposable au logement sera ouvert aux personnes directement concernées, c'est seulement à compter du 1er janvier 2012 que ce droit sera étendu à toute personne éligible au logement social qui n’aurait pas reçu réponse à sa demande après un délai d’attente anormalement long. La question est dès lors de savoir qui seront les personnes "directement" concernées et quel sera le critère d'appréciation du délai "anormalement long" ? Ce délai change pour le moment suivant les départements (voir cependant : article L. 441-1-4 CCH).

- Comment déterminer le caractère prioritaire de la demande qui seul pourrait ouvrir droit à l'opposabilité du droit au logement ?

-

Aller plus loin :

- Dossier complet du Ministère de la Cohésion sociale
- Dossier législatif de l'Assemblée nationale
- Dossier d'information du Sénat

24 février 2007

LITIGES - Protection juridique : de nouvelles règles pour les assurés

LITIGES - Protection juridique : de nouvelles règles pour les assurés

La loi réformant l’assurance de protection juridique qui doit garantir
aux particuliers la prise en charge des consultations juridiques et des
frais de procédure nécessaires au règlement des litiges a été publiée au
Journal officiel du mercredi 21 février 2007.

La loi rend obligatoire le recours à un avocat quand la partie adverse est défendue par un avocat, les honoraires étant fixés entre l’avocat et l’assuré. L’assureur ne peut proposer le nom d’un avocat à l’assuré sans une demande écrite de la part de ce dernier.

La loi précise également que les personnes bénéficiant d’un contrat d’assurance de protection juridique n’ont plus accès à l’aide juridictionnelle versée habituellement par l’Etat aux personnes à revenus modestes.

23 février 2007

Affaire Dieudonné : Suite et fin ?

Par un arrêt du 16 février 2007, la Cour de cassation, renvoit à la Cour d'appel de Versailles pour statuer définitivement sur le sort de Dieudonné. Pour résumer : Dieudonné est relaxé définitivement mais sera condamné à indemniser les victimes.

Celui-ci avait été relaxé trois fois dans cette affaire (une fois par le tribunal correctionnel de Paris, deux fois par la cour d'appel de la même ville : et 9 février 2006). Dans l'ensemble, ses tribunaux et cours avaient considérés que :
"replacés dans leur contexte, les termes "les juifs, c'est une secte, c'est une escroquerie" relèvent d'un débat théorique sur l'influence des religions et ne constituent pas une attaque dirigée contre la communauté juive en tant que communauté humaine".

De même en 2005, la Cour de cassation, sur la même affaire avait relaxé Dieudonné du moins du chef d'incitation à la discrimination raciale (arrêt du 15 mars 2005).

La nouvelle décision de la Cour de cassation renvoie l'affaire une dernière fois devant la Cour d'appel de Versailles (et non plus Paris). Celle-ci ne pourra que se plier à la position de principe de la Cour de cassation. Dieudonné ne pourrait donc pas échapper à la condamnation pour injure racial. La Cour de cassation ayant rappelé que "...propos de dieudonné...ne relève pas de la libre critique du fait religieux, participant d'un débat d'intérêt général mais constitue une injure visant un groupe de personnes en raison de son origine, dont la répression est une restriction nécessaire à la liberté d'expression dans une société démocratique".

Seulement dans cette dans cette affaire, le parquet général ne s'est pas pourvu en cassation, et ce dès la première décision de la cour d'appel de Paris. De ce fait, l'action publique est éteinte et donc Dieudonné ne peut plus être reconnu coupable (et donc condamné) du délit et se voir infliger une peine, le parquet n'ayant pas contesté sa relaxe.

Seule l'action civile, exercée par les associations en cause (la LICRA et le consistoire central union des communautés juives de France), continue, et c'est de cette action seule qu'est saisie la cour d'appel de Versailles. Les associations en cause peuvent être indemnisées.

Pour "le journal d'un avocat" aussi, "la cour d'appel de Versailles ne pourra que constater que les éléments du délit sont réunis et condamner Dieudonné à payer des dommages intérêts et frais de procédure à ces associations, mais aucune condamnation pénale ne sera prononcée, et rien ne figurera sur son casier judiciaire".

Ci-dessous la décision complète.

06-81.785
Arrêt n° 552 du 16 février 2007
Cour de cassation - Assemblée plénière


Cassation partielle

* Communiqué







Demandeur(s) à la cassation : Le Consistoire central union des communautés juives de France

Défendeur(s) à la cassation : M. X..., dit Y...



L'association Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme et le Consistoire central union des communautés juives de France se sont pourvus en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 30 juin 2004 (11e chambre, section A) ;

Cet arrêt a été partiellement cassé le 15 mars 2005 par la chambre criminelle de la Cour de cassation ;

La cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, qui, saisie de la même affaire, a statué par arrêt du 9 février 2006 dans le même sens que la précédente formation de la même cour d'appel par des motifs qui sont en opposition avec la doctrine de l'arrêt de cassation ;

Un pourvoi ayant été formé contre l'arrêt du 9 février 2006, M. le premier président a, par ordonnance du 21 juin 2006, renvoyé la cause et les parties devant l'assemblée plénière ;

La demanderesse invoque, devant l'assemblée plénière, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier, avocat du Consistoire central union des communautés juives de France ;

Le rapport écrit de M. Gueudet, conseiller, et l'avis écrit de M. Mouton, avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;

(...)

Sur le moyen unique :

Vu les articles 29, alinéa 2, et 33, alinéa 3, de la loi du 29 juillet 1881 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le journal "Lyon Capitale" a publié dans son numéro du 23 au 29 janvier 2002, dans une rubrique intitulée "Politique présidentielle 2002" sous le titre "Y... humoriste et candidat aux présidentielles. Y... existe-t-il ?", un entretien au cours duquel, M. X..., dit Y..., en réponse à la question "que pensez-vous de la montée de l'antisémitisme parmi certains jeunes beurs ?" a déclaré "Le racisme a été inventé par Abraham. "Le peuple élu", c'est le début du racisme. Les musulmans aujourd'hui renvoient la réponse du berger à la bergère. Juifs et musulmans pour moi, ça n'existe pas. Donc antisémite n'existe pas, parce que juif n'existe pas. Ce sont deux notions aussi stupides l'une que l'autre. Personne n'est juif ou alors tout le monde. Je ne comprends rien à cette histoire. Pour moi, les juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c'est la première. Certains musulmans prennent la même voie en ranimant des concepts comme "la guerre sainte..." ; que sur plainte de l'Union des étudiants juifs de France, le procureur de la République a fait citer directement M. X..., devant le tribunal correctionnel pour y répondre notamment du délit d'injure publique raciale ; que le Consistoire central union des communautés juives de France s'est constitué partie civile ;

Attendu que, pour débouter la partie civile, l'arrêt retient que, replacés dans leur contexte, les termes "les juifs, c'est une secte, c'est une escroquerie" relèvent d'un débat théorique sur l'influence des religions et ne constituent pas une attaque dirigée contre la communauté juive en tant que communauté humaine ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'affirmation "les juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c'est la première", ne relève pas de la libre critique du fait religieux, participant d'un débat d'intérêt général mais constitue une injure visant un groupe de personnes en raison de son origine, dont la répression est une restriction nécessaire à la liberté d'expression dans une société démocratique, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des propos incriminés et les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions ayant débouté le Consistoire central union des communautés juives de France de son action civile du chef d'injure publique raciale, l'arrêt rendu le 9 février 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;



MOYEN ANNEXÉ

Moyen produit par la SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour le Consistoire central union des communautés juives de France


VIOLATION des articles 29 et 33 de la loi du 29 juillet 1881, ensemble l'article 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse aux conclusions et manque de base légale ;

EN CE QUE l'arrêt attaqué a jugé non constitué le délit d'injure publique envers la communauté juive ;

AUX MOTIFS QUE le prévenu ne conteste pas avoir tenu les propos reproduits dans le périodique Lyon Capitale ; que le passage incriminé doit être replacé dans son contexte ; qu'en réponse à une question du journaliste Philippe Chaslot sur la « dette de la France envers les descendants d 'esclaves », Y... critique l'attitude des pouvoirs publics et saisit cette occasion pour attaquer violemment la religion catholique : « ... En cas de crise, Chirac et Jospin se retrouvent ensemble dans une église. Moi, à leur place, plutôt que d'écouter les bêtises de Lustiger, j'aurais pris les textes sacrés et je les aurais brûlés sous l'Arc de Triomphe pour symboliser la destruction des frontières virtuelles qui séparent les hommes jusqu'à les pousser à s 'entretuer » ; que le journaliste évoque alors la « montée de l'antisémitisme chez certains jeunes beurs » ; que Y..., dans sa réponse, renvoie dos à dos les musulmans et les juifs, impute le phénomène du racisme aux religions et proclame son athéisme : « Juifs et musulmans, pour moi, ça n'existe pas. Donc antisémite, ça n'existe pas parce que juif n'existe pas. Ce sont deux notions aussi stupides l'une que l'autre. Personne n'est juif ou alors tout le monde. Je ne comprends rien à cette histoire » ; qu'il poursuit sa démonstration en ajoutant : « Pour moi, les juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c'est la première. Certains musulmans prennent la même voie en ranimant des concepts comme la guerre sainte, etc. » ; que replacée dans son contexte, la phrase « les juifs, c'est une secte, une escroquerie » ne vise pas la communauté juive en tant que communauté humaine mais la religion juive ; que Y... la fustige au même titre que la religion musulmane (« Les musulmans aujourd'hui renvoient la réponse du berger à la bergère ») et la religion catholique (« ... j'aurais pris les textes sacrés et je les aurais brûlés sous l'Arc de Triomphe... »), tout en faisant peser sur la religion juive une responsabilité particulière en tant que « première » religion monothéiste ; que la phrase poursuivie relève d'un débat d'ordre théorique sur l'influence des religions et ne constitue pas une attaque dirigée contre un groupe de personnes en tant que tel ; que cette interprétation est confortée par le commentaire introductif du journaliste : « ... Son anticléricalisme tous azimuts l'entraîne à nier jusqu'à l'existence même du fait religieux » ; que Y..., qui associe racisme et religion, dénonce dans sa réponse avec une même virulence toutes les religions ; que dès lors l'un des éléments constitutifs du délit d'injure publique envers un groupe de personnes fait défaut ;

ALORS QUE, D'UNE PART, il résulte des propres constatations de l'arrêt que Y... avait tenu les propos suivants : « Pour moi, les juifs, c'est une secte, une escroquerie. C'est une des plus graves parce que c 'est la première » ; que ces propos mettaient spécialement en cause la communauté juive, présentée comme « une des plus graves escroqueries » parce que « la première de toutes » si bien qu'en refusant de sanctionner l'atteinte injurieuse que ces propos faisaient subir, en raison de leur appartenance religieuse, à un groupe de personnes précisément désigné, à savoir la communauté juive de France, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 29 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 ;

ALORS, D'AUTRE PART, QU'en jugeant non punissables les propos injurieux parce qu'ils n'auraient pas visé « la communauté juive en tant que communauté humaine mais la religion juive (...) tout en faisant peser sur la religion juive une responsabilité particulière », et n'auraient pas constitué « une attaque dirigée contre un groupe de personnes en tant que tel », alors que ces propos mettaient précisément en cause la communauté juive à raison de sa religion, ce qui manifestait une conviction ouvertement antisémite, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 29 et 33 de la loi du 29 juillet 1881.



Président : M. Canivet, premier président
Rapporteur : M. Gueudet, conseiller, assisté de M. Roublot, auditeur au service de documentation et d'études
Avocat général : M. Mouton
Avocat(s) : la SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier

21 février 2007

La procédure législative en France

Le parcours de l'élaboration d'une loi et la « navette parlementaire »

Présentation schématique simplifiée de la procédure législative (loi ordinaire)


En savoir plus (site de l'Assemblée nationale) :

- La procédure législative

- Les fonctions législatives de l'Assemblée nationale


- Ouvrage consacré à la procédure parlementaire

1. INITIATIVE DE LA LOI

Premier ministre


Députés

Sénateurs

Projet de loi

Proposition de loi

Proposition de loi

Délibération en Conseil des ministres, après avis du Conseil d'État

Contrôle de la recevabilité financière
de la proposition de loi par le Bureau
de l'Assemblée nationale ou du Sénat

2. EXAMEN DU PROJET OU DE LA PROPOSITION DE LOI PAR LE PARLEMENT

EN COMMISSION ET EN SÉANCE PUBLIQUE

Dépôt sur le bureau de l'Assemblée nationale ou du Sénat

Examen en 1ère lecture par l'une des six commissions permanentes ou par une commission spéciale, de l'Assemblée ou du Sénat, constituée à cet effet. Publication d'un rapport écrit.

Discussion en 1ère lecture en séance publique et vote

Transmission à l'autre assemblée qui n'était pas saisie en premier

Examen en 1ère lecture par l'une des six commissions permanentes (ou par une commission spéciale) du Sénat ou de l'Assemblée nationale. Publication d'un rapport écrit

Discussion en 1ère lecture en séance publique et vote

En cas d'accord entre les assemblées...

Adoption du texte dans les mêmes termes par les deux assemblées

A défaut d'accord entre les deux assemblées ...

A défaut d'accord entre les deux assemblées, après une première lecture, transmission du texte à la première assemblée saisie

ou

Après deux lectures dans chaque assemblée, à la demande du Premier ministre, réunion d'une commission mixte paritaire (CMP), composée de 7 députés et de 7 sénateurs, sur les dispositions restant en discussion.

Si l'urgence a été déclarée, la CMP peut être réunie après une seule lecture par chacune des assemblées.

2ème lecture : Examen en commission, discussion en séance publique et vote, nouvelle transmission à l'autre assemblée

Examen et vote par chacune des deux assemblées du texte élaboré par la CMP ou, en cas d'échec de la CMP ou de rejet du texte de la CMP, nouvelle lecture par chaque assemblée

Poursuite de la « navette » (nouvelles lectures successives par les deux assemblées) : examens, votes et nouvelles transmissions

Après une nouvelle lecture par chacune des assemblées, le Gouvernement peut demander à l'Assemblée nationale de statuer définitivement

Texte définitif adopté dans les mêmes termes par les deux assemblées

Texte définitif adopté dans les mêmes termes par les deux assemblées ou adopté par l'Assemblée nationale statuant à titre définitif

3. CONTRÔLE DE CONSTITUTIONNALITÉ ET PROMULGATION DE LA LOI

Saisine éventuelle du Conseil constitutionnel par le Président de la République, le Premier ministre, le Président de l'Assemblée nationale, le Président du Sénat ou 60 députés ou 60 sénateurs

Décision du Conseil constitutionnel, en cas de saisine

Promulgation de la loi par le Président de la République
et publication au Journal officiel de la République française

16 février 2007

Loi portant réforme de l’assurance de protection juridique : Adoption définitive

Adoption définitive par l’Assemblée Nationale lors de sa séance du 8 février dernier de la proposition de loi réformant l’assurance de protection juridique afin d’en faciliter la mise en œuvre.

La loi développe un important outil d’accès au droit dans des conditions protectrices des intérêts de l’assuré.

Elle permet de mieux définir les rôles respectifs des avocats et des assureurs en garantissant une véritable sécurité juridique aux citoyens.

Le Parlement reconnaît ainsi la nécessité de faire bénéficier les assurés de conseils par un avocat et de la confidentialité que seul ce dernier est en mesure de lui apporter.

La loi garantit également le caractère libéral de la profession et l’indépendance de l’avocat à travers la liberté de choix effective de l’avocat par l’assuré et la libre détermination des honoraires entre l’avocat et son client dans le cadre de l’assurance de protection juridique.

Enfin, la loi tient compte de la nécessité d’améliorer l’aide juridictionnelle en prévoyant une simplification de la procédure, une harmonisation des décisions des bureaux d’aide juridictionnelle et un renforcement de l’accès aux droits des personnes les plus démunies.

Le Conseil national des barreaux de France, représentant la profession d’avocat, espère que ce nouveau dispositif permettra de promouvoir le développement de l’assurance de protection juridique en France dans des relations d’équilibre retrouvé avec les assureurs, au seul bénéfice de l’accès au droit de nos concitoyens ( Communiqué de presse du 8 février 2007).

La loi portant réforme de l’assurance de protection juridique s’articule selon les dispositions suivantes :

1) L’article 1 assure une égalité entre les parties en litige et une confidentialité de leurs échanges.

Il a pour objet d'adapter le point de départ du délai de déclaration du sinistre aux spécificités du risque couvert en matière d'assurance de protection juridique.

La loi permet de clarifier les obligations réciproques de l'assuré et de l'assureur avant la déclaration de sinistre.

Elle assure une égalité entre les parties en litige et une confidentialité de leurs échanges, favorable à la conclusion d'une éventuelle transaction. En effet, il est prévu que « l'assureur ne peut assister ni représenter seul l'assuré lorsqu'il est informé de ce que la partie adverse est assistée ou représentée par un avocat. »

2) L’article 2 rend plus effectif le principe de la liberté de choix de l’avocat.

L'article L. 127-3 du Code des assurances est complété par un quatrième alinéa ainsi rédigé : « L'assureur ne peut proposer le nom d'un avocat à l'assuré sans demande écrite de sa part. »

Cette disposition vise à s’assurer que la désignation de l’avocat par un assuré procède d’un choix délibéré.

3) L’article 3 garantit la libre détermination des honoraires entre l’assuré et son avocat.

La loi prévoit que « les honoraires de l'avocat sont déterminés entre ce dernier et son client, sans pouvoir faire l'objet d'un accord avec l'assureur de protection juridique. »

Le Code des assurances reprend les principes de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée afin de clarifier les relations entre l'avocat et son client lorsque ce dernier a recours à l'assurance de protection juridique.

L’exposé des motifs de la proposition de loi rappelait opportunément que « cette règle participe d'une manière essentielle du caractère libéral de la profession d'avocat. Afin que ce dernier ne puisse être placé dans une situation de conflit d'intérêts entre l'assuré et l'assureur, la prédétermination d'un plafond d'honoraires, ou de toute autre convention d'honoraires, entre l'avocat et l'assureur est interdite. »

A cet égard, Renaud DUTREIL, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et des professions libérales, a indiqué que le Gouvernement transmettra au Conseil d’État, dans les prochains jours, un projet de décret modifiant les règles déontologiques de la profession d’avocat aux termes duquel, « dans le cadre d'une assurance de protection juridique, l’avocat sera tenu de proposer à son client une convention d'honoraires afin que les règles de facturation soient établies dès le début du litige. Ainsi, la liberté de choix de l'avocat et son indépendance seront pleinement garanties, parce qu'elles procéderont de l'économie même du contrat d'assurance. » ( lien vers les débats du 8 février 2007 )

4) Les frais et honoraires exposés pour le règlement du litige peuvent être remboursés à l’assuré.

La loi fait obligation de prévoir dans tout contrat d’assurance de protection juridique que les frais et dépens alloués par le juge bénéficieront prioritairement à l’assuré pour les dépenses restées à sa charge, et subsidiairement à l’assureur dans la limite des sommes qu’il a engagées.

5) La loi introduit des règles d’harmonisation avec l’aide juridictionnelle.

Cinq articles relatifs à l’aide juridictionnelle issus d’amendements déposés par le Gouvernement vont dans le sens d’une plus grande simplification de la procédure, d’une harmonisation des décisions et d’un renforcement de l’accès aux droits des personnes les plus démunies.

a) Un mécanisme de subsidiarité de l’aide juridictionnelle est introduit prévoyant qu’elle « n'est pas accordée lorsque les frais couverts par cette aide sont pris en charge au titre d'un contrat d'assurance de protection juridique ou d'un système de protection. »

b) La ratification de l’ordonnance du 8 décembre 2005 modifiant la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique permet, d’une part, de ne pas tenir compte lors d’une demande d’aide juridictionnelle, des ressources des parents du mineur poursuivi pénalement lorsque ces derniers manifestent un défaut d’intérêt à son égard et, d’autre part, de simplifier la procédure de recouvrement des honoraires mis à la charge de la partie perdante par le juge au profit de l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale.

c) Les recours contre les décisions des bureaux d’aide juridictionnelle sont centralisés devant les cours d’appel, ce qui permettra l’harmonisation très attendue de la jurisprudence en la matière.

d) L’aide juridictionnelle couvrira la rétribution d’une nouvelle mission non indemnisée jusqu’alors, à savoir l’assistance par un avocat d’une personne détenue faisant l’objet d’une procédure de placement à l’isolement d’office ou faisant l’objet d’une mesure de levée d’un placement à l’isolement à sa demande.

e) Une personne contestant une mesure de refus de titre de séjour assortie d’une obligation de quitter le territoire français, créée par la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration, aura désormais la possibilité de bénéficier de l’aide juridictionnelle sans condition de résidence habituelle et régulière sur le territoire national, condition qui, déjà, n’est pas exigée des personnes exerçant un recours contre un arrêté de reconduite à la frontière.

Le Conseil National, dans le cadre du suivi de cette réforme, demande aux avocats de bien vouloir l’informer des difficultés d’application susceptibles de se poser dans les semaines qui viennent et de lui communiquer tout document utile émanant des compagnies d’assurance de protection juridique.

Loi adoptée définitivement par l’Assemblée Nationale le 8 février 2007
Compte-rendu des débats à l’Assemblée Nationale le 8 février 2007

Conditions d’application de l’aide juridictionnelle dans le cadre des nouvelles procédures d’éloignement des étrangers

Conditions d’application de l’aide juridictionnelle dans le cadre des nouvelles procédures d’éloignement des étrangers

L’Assemblée générale du Conseil National des Barreaux vient de demander que la Chancellerie soit officiellement saisie des conditions d’application de l’aide juridictionnelle dans le cadre des nouvelles procédures d’éloignement des étrangers en vigueur depuis le 1 er janvier 2007 en application des dispositions de la loi du 24 juillet 2006 relative à l’immigration et à l’intégration.

La loi portant réforme de l’assurance de protection juridique permet dorénavant à une personne contestant une mesure de refus de titre de séjour assortie d’une obligation de quitter le territoire français de bénéficier de l’aide juridictionnelle sans condition de résidence habituelle et régulière sur le territoire national, condition qui, déjà, n’est pas exigée des personnes exerçant un recours contre un arrêté de reconduite à la frontière.

En l’état, l'avocat assistant un étranger faisant l’objet d'un refus de séjour perçoit
20 UV pour la requête en annulation (comme pour toute requête en annulation devant le tribunal administratif), puis 6 UV pour la requête en annulation de l'arrêté de reconduite à la frontière présentée devant le Président du Tribunal administratif, soit au total 26 UV (soit environ 624 € pour une UV à environ 24 €).

Il serait envisagé dans un projet de décret de limiter à 8 ou 10 UV le montant de l'indemnité versée à l'avocat pour la requête unique contre le refus de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination (soit 240 €).

L’indemnité de l’avocat diminuerait alors que ses diligences et ses actes s’accroissent. Il devra rédiger en urgence une requête motivée, en droit et en fait, tant sur le refus de séjour que sur l’obligation de quitter le territoire français, accompagnée des pièces en quatre exemplaires (les frais de photocopies absorbant la plus grande partie de l’indemnité d’aide juridictionnelle).

Une telle diminution du nombre d’UV de plus des deux tiers serait d'autant plus inacceptable que le gouvernement déciderait ainsi de réduire de manière drastique l’indemnisation des avocats intervenant pour la défense des droits fondamentaux des étrangers quelques jours à peine après les assises de l’aide juridictionnelle et alors que la profession d'avocat est mobilisée pour une réforme de l'accès au droit et de l'aide juridictionnelle qui garantisse un accès à la justice pour les plus démunis et une rémunération décente pour les avocats intervenant à ce titre.

Ce projet de décret préciserait également que la demande d'aide juridictionnelle ne suspendrait pas le délai de recours d'un mois imparti à l'étranger pour contester la décision de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français, ce recours devant être lui-même jugé par le Tribunal administratif dans un délai de trois mois à compter de sa saisine.

On introduirait ainsi une exception non justifiée au principe de l’effet suspensif de la demande d’aide juridictionnelle posé par l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Au regard de ces éléments, l’Assemblée générale du Conseil National a rappelé la position légitime de la profession en matière d'accès au droit et à l'aide juridictionnelle et a demandé en particulier, s'agissant de la défense des étrangers :

  • d'une part, que le nombre d'UV servant de base à l'indemnisation de l'avocat représentant un étranger dans le cadre du contentieux du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français soit fixé à 26 UV ;
  • d'autre part, que les étrangers soient éligibles à l'aide juridictionnelle en toutes matières sans condition de régularité de séjour ;
  • enfin, que le principe du caractère interruptif du délai de saisine de la juridiction de première instance par une demande d'aide juridictionnelle soit maintenu dans le contentieux du refus de séjour des étrangers.

01 février 2007

Assises de l'aide juridictionnelle et de l'accès au droit

A la suite du mouvement de mobilisation des avocats pour une revalorisation immédiate des indemnités d'aide juridictionnelle et une réforme globale du système, prolongé par le rassemblement national à Paris du 18 décembre 2006, le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, avait annoncé la tenue « d'Assises de l'aide juridictionnelle et de l'accès au droit ».

Ces Assises se sont déroulées ce mardi 30 janvier au ministère de la Justice.

La délégation de la profession emmenée par le Président Paul-Albert IWEINS était composée des représentants du Conseil National des Barreaux, du Barreau de Paris, de la Conférence des Bâtonniers, des organisations syndicales et des anciens membres du CNAJ.

Le programme était articulé autour de quatre ateliers auxquels participaient des parlementaires, avocats, magistrats, représentants des usagers du droit et des assureurs, membres des cabinets du ministère de la justice et du ministère de l'économie et des finances. Des journalistes étaient également présents tout au long des travaux.

Les thèmes des quatre ateliers étaient ainsi définis :

Atelier n° 1 - Admission à l'aide juridictionnelle
(Modérateur : Jean-Claude MAGENDIE, Président du TGI de Paris)

Atelier n° 2 - Les garanties d'une défense de qualité
(Modérateur : Brigitte MARSIGNY, Présidente de la Commission accès au droit du Conseil National des Barreaux)

Atelier n° 3 - Financement de l'aide juridictionnelle et rétribution des avocats
(Modérateur : Elisabeth DEVILLE-LINDEN, Première Présidente de la Cour d'appel d'Angers)

Atelier n° 4 - Aide juridictionnelle et assurance de protection juridique
(Modérateur : Laurent LEVENEUR, Professeur à l'Université Paris II)

Le Garde des Sceaux a rappelé dans son discours d'ouverture des travaux que « l'accès à la justice est un droit essentiel et, à ce titre, l'aide à l'accès à la justice, autrement dit l'aide juridictionnelle, est une priorité pour une démocratie telle que la nôtre ».

Il a dressé le constat d'un « accroissement sans précédent » du budget consacré à l'aide juridictionnelle en raison d'un besoin croissant de justice et de recours au juge, notamment par la création de nouvelles procédures en matière pénale ayant entraîné une forte augmentation du nombre d'admissions à l'aide juridictionnelle.

Il a dès lors posé la question des moyens permettant de garantir aux plus démunis une défense de qualité, dans tous les domaines, dans un contexte budgétaire qualifié de « nécessairement contraint ».

Parmi les pistes de réflexion annoncées par le ministre de la Justice, on notera :

La recherche d'une complémentarité entre assurance de protection juridique et aide juridictionnelle (proposition de loi sur l'assurance protection juridique adoptée en première lecture par le Sénat et inscrite à l'ordre du jour prioritaire du gouvernement pour la séance du 8 février prochain à l'Assemblée Nationale).

Au-delà du principe de subsidiarité de l'assurance protection juridique, la recherche de modes complémentaires de financement de l'aide juridictionnelle permettant de dégager de nouvelles ressources.

La question des conditions d'admission à l'aide juridictionnelle actuellement élargie à tous les contentieux.

Les garanties d'une défense de qualité, notamment par la généralisation des conventions d'honoraires.

Les mesures visant à simplifier les demandes d'aide juridictionnelle et à faciliter les démarches des justiciables et des avocats (dématérialisation des dossiers d'aide juridictionnelle).

Le Président Paul-Albert IWEINS a rappelé au Garde des Sceaux, dans son intervention au nom de la profession, « que le 18 décembre dernier, près de 5.000 avocats étaient dans la rue pour dire, haut et clair, que le système actuel qui fait supporter par la profession l'essentiel de l'effort de solidarité nationale n'était plus acceptable ».

Il a rappelé les attentes de la profession quant à une refonte globale du système de l'aide juridictionnelle et a indiqué que les propositions concrètes de la plateforme commune, remise au Garde des Sceaux lors du rassemblement national du 18 décembre, pouvaient être satisfaites, sans attendre, par voie réglementaire.

Il a fait part au Garde des Sceaux de la détermination de la profession en affirmant que « rien ne pourra plus continuer comme avant ».

Il a souligné que « l'effort budgétaire demandé à l'Etat doit rester une priorité, l'accès au droit relevant des missions régaliennes de l'Etat », et « s'est inquiété de la baisse de l'activité juridique qui témoigne des difficultés d'accès au juge des citoyens ».

« Si la profession est convaincue de la nécessité de pratiquer en la matière une défense de qualité, celle-ci a à l'évidence un prix que les avocats ne peuvent être seuls à payer. Il faudra aussi faire preuve d'imagination pour maîtriser les coûts. La contractualisation, l'honoraire de résultat, et pourquoi pas de nouveaux modes d'exercice sous le contrôle des Ordres méritent d'être examinés ».

Le Président IWEINS s'est dit « porteur d'un message de tous ceux qui participent quotidiennement, et au-delà du raisonnable, à cette défense de nos concitoyens au titre de l'aide juridictionnelle. Ils ne veulent plus être associés à ce qui s'apparente à une sous-justice, exercée par des avocats considérés comme étant de catégorie inférieure au bénéfice de justiciables de seconde zone ».

« La République ne distingue pas entre les citoyens, les avocats constituent un seul Barreau et les prestations de certains ne sauraient être considérées comme inférieures ».

A l'issue des travaux, et après la synthèse des propositions émanant des quatre ateliers, le Directeur de cabinet du Garde des Sceaux a immédiatement formulé un certain de nombre de propositions.

Certaines d'entre elles préfigureraient les grandes lignes d'une réforme d'ampleur de l'aide juridique, qu'il n'est plus possible d'envisager avant les prochaines échéances électorales, mais dont la mise en ouvre pourrait être décidée dans le cadre d'une nouvelle loi de programmation pour la Justice, dès qu'un nouveau calendrier législatif le permettra :

Extension du champ de l'aide juridictionnelle à des missions non juridictionnelles.

Modifications des conditions d'accès à l'aide juridictionnelle.

Recherche des financements complémentaires.

La question de la création d'une « Caisse nationale de l'aide juridictionnelle » chargée de gérer la dotation allouée par l'Etat en partenariat avec les assureurs, les consommateurs et l'ensemble des auxiliaires de justice, mérite selon lui d'être posée et expertisée.

Concernant les mesures immédiates par voie réglementaire annoncées par le Garde des Sceaux, un consensus pourrait se dégager sur un certain nombre de dispositions techniques ayant trait à chacune des thématiques abordées en atelier, parmi lesquelles :

Les conditions d'admission à l'aide juridictionnelle totale des personnes dépourvues de ressources dont l'avocat est commis d'office, l'avocat ne devant plus supporter les conséquences financières d'un rejet d'une demande d'aide juridictionnelle présentée après son intervention.

La généralisation de la signature d'une convention d'honoraires de résultat entre le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale et son avocat en cas de retour à meilleure fortune, y compris lorsque cette aide a été accordée sans conditions de ressources aux victimes d'infractions graves.

L'information systématique de l'avocat de tout recours formé à l'encontre des décisions d'AJ.

La possibilité de verser une avance sur dotation aux barreaux signataires d'un protocole de défense de qualité.

L'indemnisation d'un certain nombre de missions non indemnisées, particulièrement l'assistance par l'avocat d'une personne détenue faisant l'objet d'une procédure d'isolement, ou l'assistance d'une personne étrangère ayant formé un recours contre une décision de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire.

Une réforme du Conseil National de l'Aide Juridique a également été évoquée à plusieurs reprises.

Le Directeur de cabinet du Garde des Sceaux s'est engagé à revenir dans les tous prochains jours vers la profession afin de prendre l'ensemble de ces mesures, qui pourront être complétées le cas échéant par d'autres points d'accord.

Le texte final pourrait être entériné dans son principe lors d'une conférence de consensus fixée à la mi-mars. Aussitôt après, le projet de décret pourra être soumis pour avis au Conseil d'Etat en vue de sa publication avant les échéances électorales.

Le Conseil National des Barreaux a pris acte des propositions émises par les pouvoirs publics dans l'attente de l'indispensable réforme de fond de l'accès au droit par voie législative. Il sera particulièrement vigilant au respect des engagements pris par le Garde des Sceaux lors de ces Assises et au calendrier annoncé pour les réformes immédiates par voie réglementaire.

Au-delà du rapport d'étape adopté par l'Assemblée générale du 12 janvier dernier, les propositions encore réservées sont actuellement soumises à la concertation de la profession (création d'une tranche supplémentaire à l'AJ partielle afin de bénéficier d'un taux réduit de TVA à 5,5 %, extension des protocoles, structure et financements complémentaires .).

Il s'agit en effet de parachever l'élaboration du projet de réforme des avocats, sur les orientations duquel le Conseil National des Barreaux devra aussi interpeller les candidats à l'élection présidentielle.


Communiqué du Conseil National des Barreaux, 22 rue de Londres, 75009 PARIS