22 juillet 2010

acte d'avocat et proc. participative adoptés définitivement en 1° lect. à l'Assemblée Nationale

Le 30 juin 2010, est intervenu en première lecture à l’Assemblée nationale le vote solennel :

● du projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées introduisant notamment l'acte contresigné par avocat, présenté par le Ministre d’Etat, Garde des Sceaux, (AN Texte adopté n° 505) - (AN Scrutin public n° 583)

● de la proposition de loi "Béteille" relative à l’exécution des décisions de justice et aux conditions d’exercice des professions réglementées introduisant la procédure participative de négociation assistée par un avocat. (AN Texte adopté n° 506) - (AN Scrutin public n° 584)

Malgré le dépot et le soutien de nombreux amendements contraires, les textes adoptés sont conformes sur les points essentiels que les avocats défendaient. La profession peut ainsi se réjouir que ces textes aient franchi avec succès une nouvelle étape de leur parcours parlementaire.

  • Le Sénat examinera ensuite ces textes selon un calendrier qui n'est pas encore fixé.

  • Une fois ces lois promulguées, les avocats auront à coeur de s'approprier pleinement ces nouveaux dispositifs pour en faire des outils essentiels au service de leurs clients.

Le projet de loi de modernisation et l'introduction de l'acte d'avocat

Ce projet de loi introduit dans notre droit l’acte contresigné par un avocat

  • Lors des négociations engagées par le Conseil National des Barreaux avec la Chancellerie, l'objectif de la profession a toujours été de renforcer la sécurité juridique des contrats passés entre personnes privées, sans pour autant leur conférer le caractère d’actes authentiques.

  • L’acte sous seing privé contresigné par l’avocat permet ainsi de s’assurer que chacune des parties à l’acte auront été pleinement éclairées de toutes les conséquences juridiques de celui-ci. Il tire sa sécurité juridique renforcée de la qualité de son auteur en termes de compétences, d’obligations déontologiques ou encore de responsabilité professionnelle, dont le rôle de « témoin privilégié » est ainsi reconnu.

  • Cet acte fait pleine foi de l’écriture et de la signature des parties tant à leur égard qu’à celui de leurs héritiers ou ayants cause. La procédure de faux prévue par le code de procédure civile lui est applicable. Par ailleurs, et sauf disposition contraire, il est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi.

Il contient également d'autres dispositions intéressant directement la profession

  • Il ouvre la possibilité pour les avocats, dans le respect de leur déontologie et de leurs règles professionnelles, d’agir comme mandataires pour des sportifs, des fédérations ou des clubs sportifs.

  • La fonction de vice-bâtonnier a été institutionnalisée.

  • En matière d’arbitrage, le bâtonnier pourra déléguer ses pouvoirs à un ancien bâtonnier ou à tout membre ou ancien membre du conseil de l’ordre. Le bâtonnier ou son délégué dans la procédure d’arbitrage, pourra procéder, à défaut d’accord entre les parties, à la désignation d’un expert à fin d’évaluation des parts sociales ou actions de sociétés d’avocats.

  • Afin de faciliter la constitution de réseaux, sera autorisée la détention minoritaire du capital d’une société d’exercice libéral (SEL) par une société de participations financières de professions libérales (SPFPL), même dans l’hypothèse où elle n’est pas exclusivement composée d’associés exerçant dans cette SEL. La majorité des droits de vote de la SEL sera toujours détenue, directement ou indirectement, par des associés y exerçant.

  • Il sera possible de constituer, entre personnes physiques ou morales exerçant plusieurs professions libérales juridiques ou judiciaires soumises à un statut législatif ou réglementaire, des SPFPL détenant des parts ou des actions dans des sociétés dont l'objet est l'exercice de deux ou plusieurs des professions d'avocat, d’huissier de justice, de commissaire-priseur judiciaire et de notaire.

La proposition de loi sénatoriale "Béteille " et la procédure participative

La proposition de loi « Béteille » introduit dans notre droit la procédure participative de négociation assistée par un avocat.

  • Par cette convention, les parties à un différend, qui n’a pas encore donné lieu à la saisine d’un juge ou d’un arbitre, s’engagent à œuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend.
  • Les députés ont refusé l’extension du bénéfice de l’utilisation de cette procédure aux autres professions juridiques ou aux seuls officiers publics et ministériels.

Cette procédure participative pourra être utilisée en matière de divorce et de séparation de corps, mais sera exclue en matière de droit du travail.

Pour aller plus loin :
● Projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées - Suivre le processus législatif sur www.assemblee-nationale.fr
● Proposition de loi "dite Béteille" relative à l'exécution des décisions de justice et exercice de certaines professions réglementées : Suivre le processus législatif sur www.assemblee-nationale.fr
● L'acte d'avocat et la procédure participative de négociation assistée par avocat soumis fin juin à l'examen de l'assemblée nationale - Actualité CNB du 19 juin 2010



17 juillet 2010

Se protéger avant ou pendant le procès contre l'insolvabilité du créancier : La saisie et les mesures conservatoires

Les mesures conservatoires sont des mesures permettant à un créancier de conserver ou de garantir un droit ou un bien. Elles ont pour objet de garantir, avant le procès ou pendant le procès, un créancier contre le risque d’insolvabilité de son débiteur en conservant un droit ou un bien et sont prévues par la loi n°91-650 du 9 juillet 1991.

Ces mesures sont réalisées soit pour les créances définies par la loi (loyers - chèque sans provision) soit sur autorisation du juge de l’exécution dans les autres cas.

La saisie conservatoire implique que les démarches amiables soient demeurées infructueuses. Elle a pour but de prémunir un créancier contre l’insolvabilité de son débiteur.

La mesure conservatoire est définie par l'article 67 de la loi de 1991 n° 91-650 :

"Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer son recouvrement. La mesure conservatoire prend la forme d'une saisie conservatoire ou d'une sûreté judiciaire.".

Il s'agit d'une saisie de caractère provisoire portant sur les biens d'un débiteur :

- sur les biens mobiliers corporels : meubles meublants, coffre-fort ;
- sur les biens mobiliers incorporels : sommes d'argent (compte bancaire, créances, droits d'associés, actions ou obligations).
La saisie conservatoire rendent les biens indisponibles (ils ne peuvent être ni vendus, ni déplacés) qu'ils soient détenus par le débiteur ou une tierce personne.

En cas d'urgence, un l'huissier peut procéder à une saisie dite "conservatoires". Cette saisie a pour unique but de sauvegarder les droits du créancier dans l'attente d'une décision de justice en rendant les biens du débiteur saisis indisponibles (le débiteur ne peut ni les vendre, ni les déplacer).

La procédure est fixée par les articles 210 à 265 et 278 à 282 du Décret n°92-755 du 31 juillet 1992.

En absence d'un titre exécutoire, un créancier, dont la créance apparaît comme fondée dans son principe peut adresser une requête au juge de l'exécution du tribunal de grande instance.
Le juge de l'exécution saisi statue sans débat contradictoire.


En l'absence de ces règles, les mesures conservatoires sont frappées de nullités :

- Le juge a pour obligation, sous peine de nullité, de déterminer le montant des sommes pour la garantie et la nature des biens sur lesquels elle porte.
- Le créancier dispose de trois mois pour procéder à l'exécution de l'ordonnance.
- Le créancier en absence de titre exécutoire doit, dans le mois qui suit l'exécution de la mesure conservatoire, introduire une action judiciaire afin d'en obtenir le titre.
- Le créancier a huit jours pour envoyer l'assignation en paiement à la personne chargée de l'exécution de la mesure (banque, tiers détenteur des biens).

Nantie d'un titre exécutoire, d'une lettre de change acceptée, d'un billet à ordre ou d'un contrat de bail écrit, le créancier peut s'adresser directement à un huissier de justice.

L'acte de saisie doit être notifié au débiteur et doit mentionner (article 221 D du nouveau code de procédure civile) :

- l'ordonnance d'autorisation du juge ou le titre exécutoire justifiant la saisie,
- la description des biens saisis,
- que les biens sont rendus indisponibles sous peine de sanctions,
- que le débiteur peut demander la suspension de la saisie.

Si le débiteur est absent, la copie de l’acte de saisie doit lui être signifiée, avec la mention qu’il dispose d’un délai de 8 jours pour informer l’huissier en cas de saisie antérieure.

Le débiteur peut demander au juge qui a autorisé la mesure conservatoire sa suppression s'il estime qu'elle est abusive ou non valide.

Si, en l'absence de règlement de la dette, ou d'accord du règlement de celle-ci, ou de mesure de suppression de celle-ci, le créancier obtient un jugement de condamnation contre son débiteur, il est possible de faire procéder à la vente forcée des biens selon les règles de la saisie-vente.

La saisie conservatoire sur les biens meubles corporels.

Opérations de saisie.

Après avoir rappelé au débiteur qu'il est tenu de lui indiquer les biens qui auraient fait l'objet d'une saisie antérieure et de lui en communiquer le procès-verbal, l'huissier de justice dresse un acte de saisie. (Article 221)

Cet acte contient, à peine de nullité :

1° La mention de l'autorisation du juge ou du titre en vertu duquel la saisie est pratiquée ; ces documents sont annexés à l'acte ; toutefois, s'il s'agit d'une obligation notariée ou d'une créance de l' État, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, il est seulement fait mention de la date, de la nature du titre, ainsi que du montant de la dette ;
2° La désignation détaillée des biens saisis ;
3° Si le débiteur est présent, sa déclaration au sujet d'une éventuelle saisie antérieure sur les mêmes biens ;
4° La mention, en caractères très apparents, que les biens saisis sont indisponibles, qu'ils sont placés sous la garde du débiteur, qu'ils ne peuvent être ni aliénés, ni déplacés, si ce n'est dans le cas prévu au deuxième alinéa de l'article 91, sous peine des sanctions prévues à l'article 406 du code pénal , et que le débiteur est tenu de faire connaître la présente saisie à tout créancier qui procéderait à une nouvelle saisie sur les mêmes biens ;
5° La mention, en caractères très apparents, du droit qui appartient au débiteur, si les conditions de validité de la saisie ne sont pas réunies, d'en demander la main levée au juge de l'exécution du lieu de son domicile ;
6° La désignation de la juridiction devant laquelle seront portées les autres contestations, notamment celles relatives à l'exécution de la saisie ;
7° L'indication, le cas échéant, des nom, prénom et qualité des personnes qui ont assisté aux opérations de saisie, lesquelles doivent apposer leur signature sur l'original et les copies ; en cas de refus, il en est fait mention dans l'acte ;
8° La reproduction du troisième alinéa de l'article 400 du code pénal , avec l'indication des sanctions édictées par l'article 406 de ce même code, et celle des articles 210 à 219

Il peut être fait application des dispositions de l'article 90 de la loi de 1991.

Le débiteur est présent aux opérations de saisie
Si le débiteur est présent aux opérations de saisie, l'huissier de justice lui rappelle verbalement le contenu des mentions des 4° et 5° de l'article 221. Une copie de l'acte portant les mêmes signatures que l'original lui est immédiatement remise ; cette remise vaut signification.(Article 222 du décret de 1992)

Lorsque le débiteur n'a pas assisté aux opérations de saisie, une copie de l'acte lui est signifiée, en lui impartissant un délai de huit jours pour qu'il porte à la connaissance de l'huissier de justice toute information relative à l'existence d'une éventuelle saisie antérieure et qu'il lui en communique le procès-verbal.

Si la saisie conservatoire est pratiquée entre les mains d'un tiers, il est procédé comme il est dit aux articles 99 à 106, sauf en ce qui concerne l'alinéa premier de l'article 99 et l'article 103 qui ne sont pas applicables.

L'acte de saisie est signifié au débiteur dans un délai de huit jours. Il contient en outre, à peine de nullité :

1° Une copie de l'autorisation du juge ou du titre, selon le cas, en vertu duquel la saisie a été pratiquée ;
2° La mention, en caractères très apparents, du droit qui appartient au débiteur, si les conditions de validité de la saisie ne sont pas réunies, d'en demander la nullité au juge de l'exécution du lieu de son propre domicile ;
3° La reproduction des articles 210 à 219.(Article 224)

Le créancier qui obtient un titre exécutoire constatant l'existence de sa créance signifie au débiteur un acte de conversion qui contient, à peine de nullité :

1° La référence au procès-verbal de saisie conservatoire ;
2° L'énonciation du titre exécutoire ;
3° Le décompte distinct des sommes à payer, en principal, frais et intérêts échus, ainsi que l'indication du taux des intérêts ;
4° Un commandement d'avoir à payer cette somme dans un délai de huit jours, faute de quoi il sera procédé à la vente des biens saisis.(Article 226 du Décret n°92-755 du 31 juillet 1992)

La conversion peut être signifiée dans le même acte que le jugement.
Si la saisie a été effectuée entre les mains d'un tiers, une copie de l'acte de conversion est dénoncée à ce dernier.

A l'expiration d'un délai de huit jours à compter de la date de l'acte de conversion
L'huissier de justice procède à la vérification des biens saisis. Il est dressé acte des biens manquants ou dégradés.
Dans cet acte, il est donné connaissance au débiteur qu'il dispose d'un délai d'un mois pour vendre à l'amiable les biens saisis dans les conditions prescrites aux articles 107 à 109 qui sont reproduits.(Article 227 du décret de 1992)

A défaut de vente amiable dans le délai prévu, il est procédé à la vente forcée des biens saisis.(Article 228 du décret de 1992)

16 juillet 2010

Aide juridictionnelle : obligation de vérification du juge

Une procédure de saisie immobilière a été engagée par une banque à l'encontre de Mme X. qui ne s'est pas présentée à l'audience d'orientation du 24 avril 2008. Cette dernière a déposé le jour même, au greffe du juge de l'exécution, un courrier précisant qu'elle avait formulé une demande d'aide juridictionnelle le 2 avril 2008. La vente forcée ayant été ordonnée par jugement du même jour, le bien a été adjugé en l'absence de la débitrice. L'aide juridictionnelle (AJ) a été accordée à Mme X. le 20 mai 2008. La Cour de cassation, le 24 juin 2010, a souligné qu’au regard de l'article 25 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique, et de l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l’Homme, le bénéficiaire de l'AJ a droit à l'assistance d'un avocat. En conséquence, la Cour a estimé qu’en procédant à la vente forcée, sans s'assurer que la débitrice, qui avait sollicité l'AJ, avait bien été informée de la décision rendue sur cette demande et du nom de l'avocat désigné à ce titre, le juge de l'exécution, qui a commis un excès de pouvoir, a violé les textes susvisés.

Légifrance, cass. civ, 24 juin 2010, n° 08-19.974