28 août 2010

Entreprises : Projet de loi renforçant la lutte travail illégal des étrangers sans titre de séjour

Dans le cadre de la transposition de la directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (dite directive "sanctions"), un nouveau projet de loi entend renforcer la répression des employeurs d’étrangers sans titre, mais prévoit également de faciliter la récupération des droits sociaux des étrangers employés irrégulièrement.

Juridiquement consacrée par la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, la notion de travail illégal regroupe six infractions précisément prévues et définies par le code du travail. Ces infractions ont pour dénominateur commun la violation des règles liées à l'exercice d'une activité professionnelle indépendante, en nom propre ou en société, ainsi que celles liées à l'embauche et à l'emploi des salariés.


Selon une présentation du projet de loi faite par le Gouvernement, le travail illégal recouvre des activités occultes difficilement quantifiables par nature. Le Gouvernement rappelle que dans son « rapport sur la fraude aux prélèvements obligatoires et son contrôle », le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) a évaluée à un montant compris entre 30 et 40 milliards d’euros la fraude aux finances publiques (fraude fiscale et fraude aux prélèvements sociaux), soit entre 1,7 et 2,3 % du PIB. Le travail illégal priverait ainsi les travailleurs de protection sociale, de leurs droits à la retraite, à l'assurance chômage et à l'assurance maladie ainsi que du droit du travail légal et conventionnel. Il pénaliserait les entreprises respectueuses du droit et les soumet à une concurrence déloyale. Il nuirait enfin à la société toute entière, privée de ressources.

En France, depuis 2004, la Commission nationale de lutte contre le travail illégal a élaboré plusieurs plans nationaux successifs de lutte contre cette fraude dont le dernier en date a été validé le 26 novembre 2009. Depuis 2005, sous l'impulsion du Comité interministériel de contrôle de l'immigration, la lutte contre le travail illégal intéressant des ressortissants étrangers est devenue une priorité nationale.

Le Conseil européen des 14 et 15 décembre 2006 a prévu de renforcer la coopération entre États membres en matière de lutte contre l'immigration illégale et a convenu que les mesures mises en place contre le travail illégal devaient être intensifiées. Le Parlement européen et le Conseil ont ainsi adopté, le 18 juin 2009, la directive 2009/52/CE prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l'encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.

Dans le cadre de la transposition, le projet de loi interdit de recourir sciemment, directement ou par personne interposée, aux services d’un employeur d’un étranger sans titre de séjour, afin de responsabiliser davantage les maîtres d'ouvrage ou les donneurs d'ordre.

Les sanctions administratives susceptibles d’être prononcées à l’encontre des employeurs d’étrangers sans titre sont aggravées. Elles pourront aboutir notamment à une fermeture administrative de l’établissement concerné d’une durée maximale de trois mois, au remboursement des aides publiques précédemment octroyées, ou à l’exclusion de la commande publique.

Le projet de loi prévoit également de mieux protéger les droits des étrangers en situation irrégulière employés dans les entreprises, réadmis dans leur pays d’origine, en imposant à ces entreprises des charges particulières. Elles devront prendre en charge les indemnités, les arriérés de salaires, les cotisations sociales, ainsi que les frais de réacheminement. Une caisse sera créée afin de récupérer les cotisations sociales dues par ces entreprises et d’en faire bénéficier les étrangers réadmis dans leurs pays d’origine. À défaut de preuve contraire, les sommes dues au salarié correspondent à une relation de travail présumée d’une durée de trois mois. Le projet prévoit la prise en charge par l'employeur de tous les frais d'envoi des rémunérations impayées vers le pays dans lequel il a été reconduit volontairement ou non.

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Selon un rapport du Gouvernement français, en 2008, près de 9 000 procès-verbaux clos, constatant au moins une des six infractions de travail illégal et transmis au parquet, auraient été dressés par l’ensemble des corps de contrôle habilités à la lutte contre le travail illégal (+ 2 % entre 2007 et 2008, + 39 % depuis 2005). 56 % des procédures auraient été effectués par les forces de l'ordre (respectivement 22 % pour la police et 36 % pour la gendarmerie) et 20 % par l'inspection du travail. Les URSSAF auraient redressé 108 millions d'euros. Le travail dissimulé, par dissimulation d’activité ou de salariés, resterait incontestablement majoritaire (72,4 %) devant l’infraction d’emploi d’étrangers sans titre de travail (12,9 %) et le prêt illicite de main-d’œuvre (4,3 %). Même si la répartition entre les différentes infractions de travail illégal resterait assez stable depuis plusieurs années, la part relative de l'infraction d’emploi d’étranger sans titre de travail dans l’ensemble de la verbalisation serait en augmentation pour la cinquième année consécutive (7,9 % en 2005, 12,9 % en 2008) et l’implication des corps de contrôle aurait permis la multiplication par quatre des mises en cause d'employeurs indélicats (750 en 2004 et 3 000 en 2008).

22 août 2010

Successions : quel droit applicable dans les pays de l’UE ?

Quelle législation s’applique lors du décès d’un citoyen européen propriétaire d’une maison ou titulaire d’un compte bancaire dans un autre Etat membre de l’Union européenne ? 

Afin de répondre à cette question, le le Conseil des notariats de l’Union européenne a réalisé un site internet consacré au droit des successions en Europe.

Le site décrit le droit applicable aux successions dans chacun des Etats membres. Les citoyens peuvent ainsi s’informer sur l’autorité compétente et sur la manière dont les héritiers sont identifiés. Le site répond également aux questions relatives aux successions internationales : quel est le droit applicable ? Est-il possible de choisir une législation plutôt qu’une autre ?

Réalisé avec le soutien de la Commission européenne, ce site est disponible dans vingt-deux des langues de l’Union européenne.

Lancement du portail européen "e-justice"

Pour chercher un avocat dans un pays de l’Union européenne (UE) , connaître comment se déroule une procédure de médiation en Suède, s'interroger sur le registre foncier roumain ou sur le fonctionnement du système judiciaire portugais,  ... retrouver en ligne le portail européen "e-justice" qui présente dans 22 langues les systèmes judiciaires des 27 pays membres de l’UE.

Avec plus de 12 000 pages de contenu, cette première version du portail fournit des informations et des liens sur les lois et pratiques en vigueur dans tous les Etats de l’UE. 

Vous pouvez ainsi obtenir des réponses rapides lorsque vous êtes confrontés à certains événements de vie (divorce, litige, déménagement, décès). Par ailleurs, vous avez la possibilité de trouver plus facilement un praticien du droit dans un autre pays ou encore de vous renseigner sur la manière d’éviter une procédure judiciaire onéreuse. Grâce à ce portail, vous savez désormais en quelques clics quelle est la juridiction compétente, quel est le droit national applicable et quelles sont, par exemple, les conditions d’octroi de l’aide juridictionnelle.

Dans les prochaines années, ce portail sera doté de fiches d’informations sur les droits des défendeurs et des victimes pour chaque Etat. Les futures versions du portail permettront également au citoyen d’introduire une demande d’injonction de payer en ligne (dans un contexte transfrontalier). 

Enfin, les citoyens disposeront d’un outil leur permettant d’affiner leur recherche pour trouver un avocat spécialisé.

01 août 2010

Le régime de la Garde à vue est inconstitutionnel mais...

1) La pratique de la garde à vue en France est inconstitutionnelle

Le Conseil constitutionnel a jugé que, compte tenu des évolutions survenues depuis près de vingt ans, les dispositions attaquées n'instituent pas les garanties appropriées à l'utilisation qui est faite de la garde à vue. La conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infraction et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties ne peut plus être regardée comme équilibrée. Le Conseil a donc jugé que les articles 62, 63, 63-1, 63-4, alinéas 1er à 6, et 77 du code de procédure pénale sont contraires à la Constitution.


Dans sa décision n° 93-326 DC du 11 août 1993, le Conseil constitutionnel avait déclaré conforme à la Constitution les modifications apportées aux articles 63, 63-1, 63-4 et 77 du Code de procédure pénale alors soumises à son examen. Toutefois, depuis lors, une évolution des règles et des pratiques a contribué à un recours accru à la garde à vue, y compris pour des infractions mineures.

La proportion des procédures soumises à une instruction préparatoire représente désormais moins de 3% des dossiers. Dans le cadre du traitement dit « en temps réel » des procédures pénales, une personne est aujourd'hui le plus souvent jugée sur la base des seuls éléments de preuve rassemblés avant l'expiration de sa garde à vue. Celle-ci est devenue la phase principale de constitution du dossier de la procédure en vue du jugement de la personne mise en cause. Enfin, le nombre des officiers de police judiciaire est passé de 25 000 à 53 000.

Ces modifications des circonstances de droit et de fait ont contribué à ce que plus de 790 000 gardes à vue aient été décidées en 2009. Elles justifient que le Conseil constitutionnel procède à un réexamen de la constitutionnalité des articles 62, 63, 63-1, 64-4, alinéas 1er à 6, et 77 du Code de procédure pénale.

La garde à vue demeure une mesure de contrainte nécessaire à certaines opérations de police judiciaire. Toutefois les évolutions depuis 1993 doivent être accompagnées des garanties appropriées encadrant le recours à la garde à vue et assurant la protection des droits de la défense. Or toute personne suspectée d'avoir commis une infraction peut être placée en garde à vue par un officier de police judiciaire pendant 24 heures renouvelables, quelle que soit la gravité des faits. L'intéressé ne bénéficie pas de l'assistance effective d'un avocat. Il en va ainsi sans considération des circonstances susceptibles de justifier cette restriction pour conserver les preuves ou assurer la protection des personnes alors que, au demeurant, l'intéressé ne reçoit pas même la notification de son droit de garder le silence.

2) Pourtant les mesures prises avant le 1er juillet 2011 ne pourront être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité


Le Conseil constitutionnel considère que l'abrogation immédiate de ces dispositions aurait méconnu les objectifs de prévention des atteintes à l'ordre public et de recherche des auteurs d'infraction et aurait entrainé des conséquences manifestement excessives. Par ailleurs le Conseil ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation de même nature que celui du Parlement. Comme pour la décristallisation des pensions (n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010), il a donc reporté dans le temps les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité au 1er juillet 2011 avec, comme conséquence, que les mesures prises avant cette date ne pourront être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité. Ce délai, durant lequel les règles en vigueur continuent à s'appliquer, doit permettre au Parlement de choisir les modifications de la procédure pénale de nature à remédier à l'inconstitutionnalité constatée.

La décision du Conseil du 30 juillet 2010 est en ligne